vendredi 6 juin 2014

Derniers vers de Rome

Dans mes rêves fourbus je vois à les user
Les marbres blancs les trains les arbres les villages
Les rires les chansons les ombrées les feuillages
Et les émotions crues nées dans quelque musée

J'ai vu cent fois Lippi et croisé Michel-Ange
Dans des arcades lu D'Annunzio son Plaisir
Etendu les jambes de fatigue en désir
Dans mes rêves fourbus ainsi tout se mélange

Les chœurs enfants les champs dans des parcs infinis
Les carnets qu'on noircit lorsque le ciel est blanc
Les fontaines en pleurs les jours étincelants
Les rêves qu'on sait tus Amalfi Rimini

Les cyprès les langues les odeurs de café
Et la pâte levée à l'orée d'osterie
Des Vogues suffoquant dans le grand cendrier
Et les Signore sous leurs rêves décoiffés

Des enfants s'ébrouant sur des places carrées
Des vieillards l'air bougon des assiettes chantantes
Des tracts froissés de vent des soirées languissantes
Des nuits douces mortes dans un rêve amarré

Des parfums caressés de l'ailette du nez
Et des cris dans le bus des amis éloignés
Des silences de l'art par grandes empoignées
Et des rêves passés et des reflets fanés

Depuis les jours coulés dans cette langueur brève
On songe à chaque instant à chaque nuit à ces
Souvenirs italiens que l'on s'est entassés
Et qu'on ressort à chaque avide envie de rêve

jeudi 5 juin 2014

Paroles paroles

Les chaussures pourront un jour un soir parler
On les écoutera parce qu'il sera mieux
D'écouter la semelle aux souvenirs de cieux
Nombreux ainsi que les avenues les allées

Que d'entendre bêler tous ces murs amnésiques
Ils ont vu des amants des touristes crétins
Ont mangé le soleil doré tous les matins
Puis se sont rendormis sans rêve ni musique

Les murs auraient dit-on des oreilles des yeux
Mais j'écoute plutôt les chausses nous conter
Les pentes dévalées les montagnes montées
Les âmes nourrissons et les cœurs déjà vieux

Humeurs IX

 Il y a des odeurs de fin
Dans l'amer parfum du départ
Je hume cette ville afin
De sentir heureux ses épars

Les routes l'air et les mots dits
Dans le silence d'une rue
Le cœur serré des jours maudits
Le ciel et ses cieux disparus
Les âmes-sœurs tout en taudis 

mercredi 4 juin 2014

Préconciliaire II

Les hymnes bondissaient le long de l'acoustique
Sur les chapes dorées les goupillons et l'eau
Susurrait en surface une note en halo
Le chant sautait ainsi courtines dalmatiques

Le pépiement des s aériens chuchotait
Comme les pas craquants dans les miroirs de neige
Tout tournoyait autour ces odes en manège
Dansaient avec l'encens des doux et plats motets

Tout était calme et beau dans ces sons et ces bruits
Chut taisons nos voix et écoute ces parfums
Tout te tient plus proche des éclats séraphins
Chut entends ce murmure une âme qui bruit

mardi 3 juin 2014

Rêveur aux rails

"Peut-être le bonheur n'est-il que dans les gares ? "
Georges Perec, Quel petit vélo à guidon chromé au fond de la cour ?

Ici et là grondaient les basses vrombissantes
C'était ainsi que le train faisait battre son
Cœur et partout autour reniflait l'unisson
Des mécaniques aux effluves rugissantes

Deux ventricules vifs courraient juste en-dessous
En deux rails droits et ces deux aortes de fer
Nous propulsaient comme des fétus à défaire
Tous ronflaient sans s'attendre endormis wagons saouls

Les rêves s'étiolaient dans des grands fauteuils mous
Et dans ces longs songes étirés sur les rails
J'entendais vrombir le train son cœur ses entrailles

Je tressautais ivre à chacun de ses remous
Tétant mes rêveries à ses seins furibonds
Je suis le rêveur aux fantasmes à rebonds


 

Les Ailes de l'aurore

L'aube a disparu la fugitive aube claire
Sans doute a-t-elle aussi contemplé la vallée
Avec ses frondaisons de printemps inhalées
Et sa canopée basse et ses tsouin-tsouin en l'air

Et puis a disparu descendu quel versant
En nous laissant le bleu plutôt que ses rosés
Nous sommes gardiens des herbes de leur rosée
De ce que l'aube a vu dans son jour renaissant

Car rien n'a disparu dans cette grande étable
Ni la pie ni l'étoupe où les instants se chassent
D'un crépuscule d'un bleu d'une aurore basse
Nous comptons les cieux comme au jour les grains de sable

Nous voyons disparues les heures les journées
Sans ne jamais se dire Ainsi il en sera
Demain car déjà la nuit jette ses carats
Sur ce qu'à l'aurore nous avions vu faner

lundi 2 juin 2014

Marietta monta in gondola

Des palettes vives recouvrent chaque îlot
Que des lampadaires pinceaux percent souvent
Nous nous berçons dans l'ombre agitée d'un couvent
D'une maison crachée dans les reflets de l'eau

Dans une gondole dodelinant un peu
Des amoureux charmés ont le sourire béat
De passer sous cents ponts sur mille nymphéas
Sous un ciel bleu sur un vernis doux sirupeux

Aux marches d'un palais aux arabesques douces
Je les voyais passer eux au sourire clair
Humant à fleur de l'eau de la lagune l'air

Chargé des pensées qu'on voit au milieu des pousses
De jasmins parfumés tout s'élevait si haut
Tous attendaient ainsi leurs rêves de griot

dimanche 1 juin 2014

Sirupeux cieux

Les soleils se laissent naître élever tomber
Tous se répondent les mots sont dans ces couleurs
Rimes-tu dans l'orange oh l'aurore-douleur
Calcules-tu ton pi hé grand soleil bombé

Crains-tu les étoiles charognards contre toi
Astre qui fuis le jour autant que fuis la nuit
Je veux te voir tomber sous les coups de minuit
Tes semblables brûlent la voûte de ton toit

Ainsi se drape le ciel de la nappe d'astres
Las d'échanger sa robe à l'aube au point du jour
Il en était ainsi et le sera toujours

Fais ô toi ciel Samson s'écrouler ces pilastres
Revêts la dalmatique et retrousse tes manches
Et tiens tes cieux bleu nuit ceindre si bien tes hanches

samedi 31 mai 2014

Campagne Assise

Un coquelicot perce un toit touffu de blé
C'est une cheminée sur ces tuiles en gerbe
Que poursuivront demain les grandes brassées d'herbe
Vois sous ce toit déjà les chardons attablés

Une maison de pierre attendait un soleil
A l'ombre portée d'un de ces arbres lancés
Tilleuls hauts chênes verts refuges des pensées
Et là baguenaudaient sur un vent des abeilles

Tout se mettait à nu touselle grains d'avoine
Dans la pudeur fragile en un instant discret
J'étais là prenant part à ce ballet secret

Humant les foins épris les caresses pivoines
Tous étaient silencieux graines épis pétales
Seuls dans l'éveil heureux des aubes végétales

Dans le cœur des chemins tout tracés

Nous descendons les flancs des collines assises
Leur pente nous caresse et tout est si vivant
Sous les ombrages verts nous sommes les seuls vents
Poussant de chaque pas les pousses de cerise

Les rails bringuebalent les âmes jusqu'à ce
Que Florence nous noie de rayons indicibles
Au retour tout reprend ces bruits imperceptibles
Ce rythme dans nos pas et ces recoins mousseux

Les clairières la boue tout s'y offre aux rayons
Les délices pentus sont des flancs droits et drus
Et nous levons le pied pour enjamber les rus
Nous essoufflant heureux de passer un sillon

Quand montés sur la vigne en contemplant épris
La belle Création aux traits encollinés
Nous regardions cois Son œuvre terminée
Nous chantions grâce à Dieu sans un bruit sans un cri

Et rien n'avait bougé ni les monts ni les crêtes
Ni les vignes fleuries ni les quelques villas
Ni le jasmin ni les pins grandis ça et là
Ni le vent de Toscane aux souffles qu'on n'arrête

Tout était transformé pourtant un vernis rose
Avait empli le ciel un nuage en gonflait
Et son coton tout blanc se dorait s'en enflait
La stratosphère ivre montrait sa couperose

Dans ce vitrail violet couleur de manganèse
Aux reflets orangés pastels roses et pâles
Chaque coteau brillait d'un mat au fond d'opale
Nous rêvions si bien dans cette neuve Genèse

Au loin sonnait la cloche un cor tut sa diction
Tu me dis Allons-y et croisant les sarments
Chacun taisait en son cœur les mots du serment
De revenir demain revoir la Création

mardi 20 mai 2014

A Villa Farnesina

La ville palimpseste aux coupoles toupies
Qui tendent vers le bleu de l'océan d'en haut
A l'air éthéré lourd d'étés rouges quand aux
Secondes de zénith les rues sont accroupies

De vagues nuages sont charriés d'un bout à
L'autre de la Cité qui se noie de soleil
Et s'enivre Narcisse à ses propres merveilles
Hommes coins d'ombre jets dans les jardins Pietà

Un Génois sans égards conterait en chanson
Les futas séchant sur des loggias lascives
Elles-mêmes boivent du soleil aux coursives
Et s'éprennent des vins qu'y verse l'échanson

Ami le beau nous sert des fresques ses parfums
Tout entête ici-bas à si haut s'élever
Nous dormirons demain quand l'astre soulevé
Nous lèvera quand le jour prendra sa parfin


vendredi 16 mai 2014

Humeurs VIII

Et tout papillonnait ainsi qu'une âme morte
Se trouve nez-à-nez à Saint Pierre et l'escorte
Et tout se réveillait d'endormi de sacré
L'amour ensommeillé s'embellissait nacré

jeudi 15 mai 2014

Tant que subsistera le Soleil

L'amer et vigoureux océan de principe
A disputé hier à cent martins-pêcheurs
L'eau claire abandonnée à l'ombre du bêcheur
Mort avant de lécher la gourde ronde lippe

A chaque rebuffade à chaque assaut perdu
Chacun s'éteignait de battre l'air d'une goutte
Le sable s'en nourrit le désert en dégoûte
Sous le cagnard-enfer des vautours assidus

Les squelettes dodues se sont désintégrés
Au soleil d'équateur et son zénith affreux
Les cormorans ont le bec fendu des heureux
Les plumes secourues d'une teinte de grès

Sans avoir eu le temps - la clepsydre trouée -
De regarder du cœur les rayons du bourreau
L'eau leur avait manqué l'un recevait au trot
Les tatouages du ciel et sa peau s'en rouait

La chaleur dessinait d'un couteau gouache sable
Les orfèvres lézards leur or était fondu
Il sculptaient d'un tibia le visage perdu
D'oliveraies froides sous leurs cieux mal-aimables

(Crédits photo : Pierre Jakubowicz)

lundi 12 mai 2014

Fleurs aventines

Serpentins déroulés sur des pavés sauteurs
Les chemins s'élevaient au réveil des collines
Des couples s'embrassaient de roses d'aubépines
Paraît-il les jardins fleurissent en hauteur

Le terreau recrachait de gros noyaux en fleurs
Que les Romains cueillaient flâneurs ensoleillés
Les pétales roulées soufflaient en réveillaient
Les cent exhalaisons des cent tiges en pleurs

Et tout était si haut les chemins les odeurs
Les rayons d'Aventin les mirages romains
Chacun pensait le jour comme cent lendemains
L'astre arrêté gardait un air baguenaudeur

Tout était immobile en se jetant en l'air
La nuit suspendue se baissait pour mieux voir
Les bouquets recouverts d'ocre de ciel d'ivoire
Puis le jardin ferma et ses roses lanlère

(Crédit photo : Pierre Jakubowicz, que je remercie pour être venu ce week-end me voir)

jeudi 8 mai 2014

Non licet omnibus adire Romam

Prenons la Macédoine Alexandrie Capoue
Dans leurs algues cheveux nous chercherons nos poux
Et nous installerons au large de Capri
Nos vagues d'Atlantique et ses marins épris
Au cœur de Tivoli des princesses Juliae
Du pain azyme des mezzés dans nos celliers
Des toges évidées de la cuisine grasse
Des Hébreux des Germains Bretons de toute race
Une lubie des cieux à l'envers de nos cieux
Des chars des glaives des épées à leurs essieux
Nous regarderont faire en leurs podiums jaloux
Nous viderons goulus l'aqueduc d'un glouglou

La Mémoire en fleurs

Le grand dideau des mois qui barre la rivière
A tout emprisonné les mots les jours passés
Et le pêcheur des ans en a pris bien assez
Pour abandonner là la grande combrière

En regardant le ciel bleu à l'accoutumée
On se dit qu'y arrive un de ces deux solstices
Après la floraison des amies myosotis
Je ne vivrai pas deux étés à les humer

Août est si loin quand juin son cadet est si proche
Un avion souvenir portait mes premiers pas
L'autre le fera dans les ne-m'oubliez-pas
Des dernières foulées dans les asters en troche

A la mémoire en fleurs je me rappellerai
Les brassées rassemblées de pensées dans un parc
Les roses fleuries sur les chasubles éparques
Les trains déchirant la Toscane oliveraie

mardi 6 mai 2014

Aux Nuits d'été

Et les nuits étendues s'étiolent au soleil
Et les journées rumbas dansent au crépuscule
A pas feutrés petits minutes minuscules
Elles ont éclairé nos pas de leur vermeil

Alors au soir couchant lorsque les volets claquent
Le jour profiteur se jette sur les oranges
Et dessine au ciel des stratosphères à frange
Et la ville amatie quitte sa robe laque

Et les toits zinzolins s'effacent puis s'allument
Et le seul souvenir maintient le ciel mauve
Après les enjambées des cents nuages fauves
Non là tout s'est éteint à la nuit à ses brumes

Toutes les lumières les bougies non les rêves
Se sont tues pourtant nous parlons dans la pénombre
Et disparaissent à l'est déjà les flancs d'ombre
Et nous disons comme les nuits d'été sont brèves

lundi 5 mai 2014

L'Homme bateleur

" Je voulais qu'on m'aime -
Mendiant exact aux fêtes de lumière
Usé de gris et de blasphèmes.
Il me reste de cette chair les arêtes
De tant d'élancements -"
Lorand Gaspar,
Connaissance de la lumière

Dans les bocks réchauffés aux faveurs de la lune
Et dans les verres cuits au zinc enluminé
Dans les âmes lasses nées du potron-minet
Et dans le ciel blondi par le soleil aux hunes

Tout se jette si bien aux souvenirs anciens
Les passions de nuits qui s'endorment matin
Les rêves que l'on boit les visages châtains
Mille couleurs torves les toi que l'on veut sien

J'ai du cœur à revendre amis en voulez-vous
Des cris idiots des mots assombris du demain
A l'heure du berger ses béliers en chemin
Je jette tout prenez tout ce qu'on vous avoue

Dans les brumes ravies jaillies au point du jour
Je revois maintenant là l'homme bateleur
Qu'on est lorsqu'on est sot dans les nuits sans couleur
Et pour me rendormir je referme l'ajour

samedi 3 mai 2014

Sursum corda !

à Francesco P.

A la merci ombrée des vents des malheureux
Tu t'étais exposé pissenlit au zéphyr
Est-elle un caillou quand tu la rêves saphir
T'ont-ils quitté tes yeux à l'iris amoureux

La rondeur âpre de tes joues fait des rigoles
Et ton cœur des sursauts à tes éclairs profonds
Autant d'âmes se lient que d'autres se défont
Dans le noir soûl comme aux rayons des auréoles

Pauvre homme pérégrin ne savais-tu donc pas
Que les routes serpents sont celles de l'attente
Maintenant l'âme bleue aux larmes clapotantes

Porte de ses torrents bruns chacun de tes pas
Me demandes-tu si elle valait tes pleurs ?
Dans un amour n'accourt qu'au plus tard la douleur

(Crédits photos : Herbert List, Campidoglio, 1949, Agence Magnum Photos)

vendredi 2 mai 2014

Pioggia

A ma patère j'ai une écharpe un chapeau
Des bribes éparses d'histoires de voyages
Un baluchon chargé de tous mes gribouillages
Puis pour les attirer des trous dans mon appeau

J'ai jeté sur mon lit mon paletot usé
Près de mon oreiller pour rêver dans le noir
Et sur mes draps qui sont à mon songe un manoir
Entre eux on voit l'enfer du pan une fusée

Mes pieds s'éreintaient à supporter mes yeux
Où dansait tout un bal de danseurs en façades
De ciels et d'églises aux grandes embrassades
Même lorsqu'en gouttes le ciel chantait joyeux

Et sous ces rigodons sur ces pavés cymbales
Entre les gouttes fils tendus et retombés
Je rêve de soupirs longs du Tibre plombé
Serait-il sot crois-tu d'y jouer à la balle

mercredi 30 avril 2014

Humeurs VII

Les mercredis sans soleil sont comme ces grands papillons
Dont un collecteur vole les envies de voler
Il épingle un bonheur et circonscrit ses rêves
Au lourd air éthéré d'une boîte vernie

La Rhapsodie cambodgienne de Bourgault-Ducoudray

La Rhapsodie dansait sur ses airs cambodgiens
J'imaginais les toits des pagodes des temples
Les manches des femmes ces grands compas si amples
Qui s'appliquaient à faire un tracé chirurgien
Dans la panse de l'homme aux desseins de jasmin
Je voyais sous des ciels rosés aux draps de suie
Un gardien appliqué à ce que l'on s'essuie
Les pieds en arrivant dans le creux de tes mains

mercredi 23 avril 2014

Les Aubes bretonnes

" Mais j'entends déjà le jour que pétrit
Dans sa gorge la fauvette orphée
Dans le grand silence gris où mûrit l'aube."
Loran Gaspar, Patmos

Écoutez battre l'air oh le tocsin léger
Des bulles de savon escaladent les mètres
Elles se font nuage en amis mélangés
Et là-haut brillent mats libres heureux en maîtres

Sous la coupole blanche hé nous nous patientons
En caressant des doigts l'air précieux au toucher
Les bulles au sommet voient dix mille santons
Qui se plaignent d'elles et veulent se coucher

Sous des frimas plus doux des rêveries diaphanes
Et on rêve étalé de la musique sèche
Lisant Eliade Djian Marot Aristophane
Des stratus bataves embrassent l'herbe rêche

Mais non les alentours gardent leur nappe blanche
Saturés de coton de nos rêves de bleu
Des vœux de voir la haute écume en l'air qui flanche
La mousse épaisse même éructe en pleurs sableux

Zone de turbulences

Le solstice au couchant nous enferme la nuit
Et des faneaux épars brûlent déjà d'en bas
J'ai mis si peu de rêve au fond de mon cabas
Je ne vois que des rues non des feux dans la suie

Et dans l'enfer mauve des réacteurs fidèles
Les Manches de Friedrich reflètent en mourant
Les ultimes rayons qui s'en vont parcourant
D'autres sables de cœur où luit l'astre rondelle

Esquinte mes soupçons ah race des poètes
Des muses bengalies me susurrent tout bas
Mille vers incompris sur l'air la pluie l'ébat
Sur le vol aplani d'une grande alouette

Aux rythmes matraqués de l'avion en reflux
Je veux renaître en mai et être le printemps
Et revoir les buissons de cierges les étangs
Dans la terre éteinte et voir ses dunes joufflues

lundi 21 avril 2014

Aux champs

Dans le jardin on joue le soleil en berceuse
Le ballon démêloir entrouvre les branchages
Par où la crinière léonine à l'herbage
Joue avec les heures son rôle de hercheuse

Les oiseaux à l'étal en scène sur leurs branches
Pointillent l'air d'un chant soprano et joyeux
Le ciel en nuages se drape des soyeux
Cirrostratus au loin parsemé d'ailes blanches

Tout est clair et s'éteint et sans oscillations
Les inflorescences les graines de beauté
Semées des arbres là de leur pollen ôté
Jettent à l'infini leurs ramifications

Et leur dessin jauni à l'autrefois solaire
Se grise et puis se mêle aux tiges du jardin
Puis le soleil l'oublie à l'obscur incertain
Alors on sent la nuit jaillir du jour en l'air

Domnin pêcheur

Le jusant débutait au loin des mareyeuses
Salopettes jaunes verdies d'algues humides
S'épiaient dans le sommeil d'une plage languide
Le soleil dédoublait ses jets sur des baigneuses

Humant pêle-mêle l'essence les essences
Les fumées de pipe l'exhalaison perdue
Des barbes à papa et le goudron fondu
Il a le médiastin des grandes renaissances

Alors dans les chaleurs ambrées de fin de jour
La capitainerie toute plongée d'orange
Il n'aurait pas voulu qu'un murmure dérange
Ses lancers d'horizon à l'horizon toujours

Dépité d'être las l'âme en peine un dernier
Lancer déciderait de son retour déçu
Puis à son hameçon elle tirait dessus
La seiche avant les cinq autres seiches gagnées

dimanche 20 avril 2014

Sur les dunes en tempête

Les gourbets retenaient pauvres dunes de sable
Par chaque graminée les bouts de littoral
Qui chantaient dans l'oyat leur existence râle
Et tout séchait au vent des ondes périssables

Un pas suivi de l'autre et l'œuvre de chacun
Aplanissaient ici les monts de mordorure
Des cascades paillées s'écoulaient en dorure
Et s'écrasaient au pied des palées durs écrins

Les pavots allongés les tamaris courbés
Étaient tout embrassés de l'envol de ces grains
Et dansaient dans l'enfer des nuées que l'on craint
Sans s'en déraciner les scories retombées

Roulantes billes d'or d'ocre aux airs améthyste
Elles s'enthousiasmaient d'helicoïdes beiges
Elles sont à l'été ses tempêtes de neige
Chantant du haut de la dune leur acathyste

Âmes lézards enfants et vous qu'on ensorcelle
De nos sifflements mats nos tourbillons dansés
Craignez qu'un jour aussi aux heures avancées
Vos os poudroyés huent les embrassées de sel

samedi 19 avril 2014

La Plage agitée

Au Croisic

La mer jetait ses do basses tonitruantes
Ses contre-uts qui grondaient dans les odeurs de sel
Étourdissaient la vague et les cailloux crécelles
Crissaient en s'ébattant dans les gouttes gluantes

Le vert de l'eau crasseuse et le blanc des écumes
Athlètes se hissaient vers le bleu d'arrogance
Où voletaient cupide au-dessus des fragrances
Un goéland chasseur aux deux yeux qui s'allument

Dans l'eau entre les eaux là sous la grande flaque
S'en étaient agité des nageoires ventrales
Et l'oiseau fugitif furtif brisa la laque

Et puis il remonta à son berceau mistral
Pour revoir y briller quelques menus poissons
Et savourer heureux ses talents d'échanson

mardi 15 avril 2014

L'Altesse en autobus.

Ouf j'avais attrapé l'autobus de justesse
On y sentait la bière et les bouquets fanés
On y voyait des vieux assis à l'air vanné
   Moi je voyais seulement votre Altesse

Une canette était tombée et d'où j'exhale
Une amoureuse et ses fleurs la voilà la cause
Un murmure en apnée parlait d'autres de choses
   Et vous qui êtes-vous aux allures royales

Dans les amples odeurs dans les sons et les voix
Vous aviez vos airs hauts le dégoût d'exception
Princesse de Saba et reine de Sion
    Gardiez deux places vous et le chien coi

N'en déplaise sans doute à la nature haute
Que votre parenté vous légua de notable
Dans l'autobus bondé le chien peu agréable
   Allait se découvrir fier astronaute

Vous regardiez sans voir les regards aux mots tus
Une enfin se décide au bout de tant d'arrêts
S’assoie vous importune et vous fait remiser
   Sacs chien ego voilà tout rabattu

Sans gêne hautaine et fière en l'horrible autobus
Chanceuse qu'une siée au bout de tant d'arrêts
Qu'un de plus et de vous qu'aurait-on retrouvée
   Votre chien rongeant votre cubitus

samedi 12 avril 2014

Lorand Gaspar

" Genêts, oxalis, acacias,
Vers quoi creusent en nous
Ces jaunes si vivaces ?
Dieu comme l'air est doux au toucher "
Lorand Gaspar, Patmos

Sans doute qu'en vers libre à dessiner les jours
Comme ce qu'ils nous sont non comme on les replie
Pour les contraindre en rime ô la grande ordalie
On se ferait poète aux lauriers de toujours

Sans doute la technique acquise d'aventures
Doit laisser l'horizon se découvrir chanteur
Et me laisser poète applaudir enchanteur
Le ciel qui en éclairs nous montre ses ratures

Sans doute et tant et plus aux mots du grand Gaspar
Nous sommes si petits qu'à l'ombre du poète
On ne pourrait dormir ainsi qu'anachorète
L'un fait naître le doute à l'âme sans rempart

Sans doute sans ses mots sans la caresse tendre
Que le vent lui offrait sans les cieux qui s'ébattent
Sans les larmes versées les frênes qui s'abattent
On tracerait des vers sans même les attendre

Mais contemplons plutôt veux-tu ?

samedi 5 avril 2014

Jeux d'éclat raies

"J'épie le frôlement, les cris, qui saluent le jeune printemps d'avril. Mon cœur s'agite."
Alexandre Neverov, Je veux vivre

Vingt mille soupirs une rose
J'avais ça à ma boutonnière
Les joies en l'air et l'air morose
Et les mains dans les bonbonnières

Les soupçons d'eau qui s'évaporent
Deux cent mille chaussées trouées
Aux bus on joue du sémaphore
Un passe haï deux sont loués

Et dans les miroirs en portières
Marchaient par éclat aveuglant
Deux millions de rayons fiers
De vitre en vitre ah ce pas lent

Ils avaient le rythme apaisé
Qu'emprunte une rose à grandir
Combien étaient-ils reposés
Vingt millions à resplendir

jeudi 3 avril 2014

Laetare Jerusalem

" Les "Profundis" des Espérances"
Louis-Ferdinand Céline, Mort à Crédit

Et l'antependium s'était enduit de rose
Lorsque le Laetare s'était jeté à nos
Oreilles par les voix claires des sopranos
Ah le chant élevé la pandémie virose

Les ors les marbres les cierges tous les encens
Qui brûlaient vivement dedans la cassolette
L'argent sculpté écrin de ses bouts de squelettes
Donnaient un calme au beau sublime assourdissant

Tout se portait si haut - moi-même me sentais
Parmi les cent bouffées qui se tenaient si nobles -
Nous suivions suspendues poussières sans escoble
Le chœur haleur affable entonnant son motet

Et quand en jaillissant sous le dais et dehors
Dans les miasmes profonds et les effluves pieuses
Nous vivions heureux la minute impérieuse
Je vis sous deux pavés renaître un bouton d'or

mercredi 2 avril 2014

Les mots recouvrés

Lorsque la terre aura recouvert tous nos mots
Et qu'elle dansera sur de nouveaux rosiers
De nos pages rongées renaîtra de l'osier
Et des miettes d'écrits nourriront le rameau

Alors personne ne se souviendra des vers
Mais l'enfant chantera ah qu'il est doux le temps
Il fera sa cabane avec les vers d'antan
Il nous ficellera d'avec le frêne vert

Contemplant du dessus son ingéniosité
Peut-être nous ferons pleuvoir de tout sur lui
Bonheur et poésie poésie probité

Et comme nous voilà qu'il verra dans la nuit
Des graffitis d'amour que le fleuve couvrait
Se disant demain mes mots seront de l'ivraie

mardi 1 avril 2014

Avril !

" Il soufflait de nouvelles brises, des odeurs douces et charmeuses. Les jonquilles, les pâquerettes tremblotaient dans toutes les prairies... Le ciel est remonté chez lui, il gardait ses nuages comme tout le monde."
Louis-Ferdinand Céline, Mort à Crédit

Se perdre de soleil aux jardins de la LUISS
Voilà le vrai bonheur et parler aux amies
Parier sur le temps vingt-et-huit et demi
Nous voulons qu'un soleil maintenant nous enfouisse

Les couleurs primaires recouvrent nos dessins
Une peau se rougit aurons-nous mal au soir
Mais la question seule est s'allonger ou s'asseoir
Nous penserons demain à voir le médecin

Hélios cependant s'égoutte plus discret
Et nous nous échauffons de quitter l'herbe enfin
Chaque an a son hiver nul été n'est sans fin

Les feuilles de travers retiennent mais les raies
Nous hèlent d'un sursaut nous nous nous enfuyons
A demain sûrement buissons amies sillons


lundi 31 mars 2014

A Villa Doria Pamphilj

" Il fallait tout saisir au vol, des paquets de phrases entortillées... avec des nœuds... des guirlandes et des retours... des brides qui n'en finissaient plus... "
Louis-Ferdinand Céline, Mort à Crédit

Dans les havres récits et les mots condamnés
L'orfraie voit ses cris y résonner sans écho
Ah ! Ah ! L'entends-tu en en réclamant l'écot
Et nous dormeurs du val nous y allions flâner

Nous marchions ici et là villas et jungle
Marches arcs triomphants pâquerettes vallées
Au dimanche chantant chaque mont s'affalait
Nous n'y voyions qu'en sillons les anciens cingles

Les duos enchantés les ballons de nuage
Se révélaient au bleu et à tous les jeux d'ombres
Le soleil dénudait les branches les décombres
Et dessinait dans l'herbe un rêve de voyage

Nous avons vu le jour à la forme d'athlète
Et les ombrages clairs s'étendre et se foncer
Les murs blancs des maisons se voyaient enfoncés
De l'obscur avide des arbres des goulettes

Le soleil élancé avait pris son élan
Nous évoquions heureux les jeux les frères loin
Nous riions d'un enfant d'un instant d'un milouin
Et nous éloignions alanguis d'un pas lent

 (Crédits photos : Gaëlle Bertrand)

samedi 29 mars 2014

Au Luco

Aux soupçons qu'on se fait en brillant dans la vitre
A ce que l'on apprend sur un morceau d'immeuble
A nos baskets salis dans le Luxembourg meuble
Aux nuages cléments qui suspendent leurs litres

Rires peurs sapajous
Vous me faites Paris bijou


A Luna manifeste aux heures de tourment
Aux petits rabougris qui traversent sans rires
Les lingeries du temps que tendent les soupirs
Aux plaquettes de plomb qui font les ciels déments


Rires peurs sapajous
Vous me faites Paris bijou

Aux vestiges lueurs s'écarquillant de blanc
Aux cieux écrasés qui se drapent de deuil
Catafalque en nuage érigé d'un coup d’œil
Aux lampes tout de même à leur éclat tremblant

Rires peurs sapajous
Vous me faites Paris bijou

Aux doutes endormis aux amours en renaître
A l'éternel sourire au-dessus de tes larmes
A ce que tu portais mon vieux cadeau ton charme
A ceux qui t'y voyaient rabouins soleil et hêtres

Rires peurs sapajous
Vous me faites Paris bijou

A cette joue ancienne usée calmée gironde
Aux deux lampes d'huile qui brûleraient tes cils
Aux perles alertes qui par à coup oscillent
Qui fronçaient et tremblaient dedans leurs nacres rondes

Rires peurs sapajous
Vous me faites Paris bijou

Aux romans parfumés des fumeries passées
Aux ponts dont les orteils pataugent dans la Seine
A tous nos souvenirs des coups que l'on s'assène
Et à mon vœu d'étendre oh ce que j'ai froissé

Rires peurs sapajous
Vous me faites Paris bijou

(Crédits photos : André Zucca, Paris, 1942)

vendredi 28 mars 2014

Samson François

Samson et tes cheveux et tes deux mains fantasques
Y puisais-tu ta force et cueillais ton courage
Vois-tu dans les jeux clairs Madhousvâra enrage
Tu brises le silence en deux mains une frasque

Ravel et Debussy et les nuits de Chopin
Ton tabouret en l'air tu les faisais s'asseoir
Et certains accouraient pour croiser chaque soir
La comtesse Platen Frédéric sous les pins

Toi dans toute nocturne et dans toute mazurque
Tu rencontrais plutôt Boleslas le Vaillant
Copernic chevauchant l'univers tournoyant

Tu riais à la barbe étriquée du Grand Turc
Sous tes doigts chaque note était une caresse
Une colère un souffle un sot une princesse


mardi 25 mars 2014

Les Poètes II

Laissez donc naître et croître en vos larges empires
Hommes sans grands espoirs les poètes tranquilles
Ils naissent au soleil d'autres attendent qu'ils
Sèchent à d'autres vents - Mamnon - que le zéphyr

Mais eux calmes et cois n'ont pas de Panthéon
Ni aux cieux ni ici ni en quelques enfers
Rien n'est gravé au marbre ils nous disent Qu'en faire
Puisqu'Antigone nous brûlons et vous Créon

Qui abattez les murs de nos demeures vives
N'ayant plus que des mots en nos coffres de bois
Nous avons entendu vos rires aux abois
A chercher un trésor le feu qui nous ravive

A la chaleur poète où vous vous enrhumez
Pauvres bêtes sottes lorsqu'un de nos prodiges
S'y meut il fond de joie bouge d'autres s'y figent
Alors que les odeurs sont des mêmes fumées

lundi 24 mars 2014

Un silice en pétales

" Je suis né en mai. C'est moi le printemps. "
Louis-Ferdinand Céline, Mort à crédit


Chut ! le printemps cette nuit s'est couché chez moi
Il souffle en s'endormant et il parle en dormant
Je l'ai croisé hier lui galant et charmant
Il offrait ses fleurs quand les pétales émois

Là sur la chaussée un garçon pleurait du gris
Perlait jusqu'aux genoux le printemps le couvrit
De ses soleils versés sur ce qu'il découvrit
De sourire de joie de sa face amaigrie

Le printemps galant homme en était en allé
Auprès d'un cerisier je lui prenais la manche
S'il n'était libre là un déjeuner dimanche

Aux cigales d'orchestre ou aux embruns salés
Point de sud ou nord ouest ouvrez votre maison
Depuis j'habite avec la plus belle saison

jeudi 20 mars 2014

Au champ de Séléné

Dans la rue qui s'écoute éructer en silence
Des autobus lointains font leurs assauts bravaches
Haro sur le silence et cent coups de cravaches
D'un moteur quelques roues et d'un bruit ils s'élancent

Nulle ombre ne passait et nulle âme non plus
Un oiseau tut son chant lorsque je le sifflai
Croyait-il à mes do comme un carreau ciblé
Pourquoi arrêtait-il son air qui m'avait plu

La lune dépassait ses rêves de nuage
Et de l'épais manteau elle aimait déborder
Elle rebondissait des filaments sourdait

Du plâtre arrondie d'un compas Lune-moulage
Je n'aimais rien moins que cela attendre au soir
Voir les cratères comme oh cent mille ostensoirs

Où songeant au milieu aux hommes arrimés
Je les verrais le jour briller et puis s'asseoir
Boire trop et rire oui mais s'endormir jamais

mardi 11 mars 2014

La Lune abasourdie

Marie-toi un matin pour un crouton de lune
Certes la dot est maigre et que t'importe au fait
Puisque Séléné et Sol seront à la fête
L'autre brillant pour que scintille à plus tard l'une

J'ai vu que le soleil vit au rez-de-chaussée
Demande-lui d'un jour te demander ta main
Avant qu'ainsi l'amour il aille au lendemain
Aimer les ciels gris aux nuages cabossés

Courtois dans sa lumière il est l'astre aveuglant
Ne lui donnant la main que lorsque l'amour brûle
Tu feras les noces le bleu du ciel en tulle
Qui dort au soleil ne peut se vêtir de blanc

Puis tu découperas dans tes doux souvenirs
Un morceau satellite et le lui tendant
Il dira que sans ses rayons la nuit pendants
Séléné ne saurait briller et advenir

La Lune elle esseulée entendra vos soupirs
Venant et repartant à chaque vingt-huitaine
Les cratères pédants elle sera hautaine
Vous voyant bâtir dans les rayons un empire

Et si l'autre scintille à une autre que l'une
Jalouse à n'essarter que les miettes de Sol
Luna te voyant à son bras ne se console
Que tu l'aies épousé pour un crouton de lune

(Crédits photos : Herbert List, Agence Magnum Photos, 1949)

lundi 10 mars 2014

Départ départs

Ris-tu d'un rictus si tu pars
Ne me dis pas t'en amuser
A l'heure où les adieux m'emparent
M'irais-je fou les refuser

J'avais pensif un air distique
Jusqu'à l'avoir dit l'au-revoir
Qu'on voit tragique et fantastique
Porteur de blé flamand d'ivoire

Hâlant dans la nuit le chaland
Tirant docker sur ton sommeil
Le rêve avais-tu nonchalant
Quand les palais s'en émerveillent

Tout se complique dans l'exode
Les bus les trains billets et pièces
Le sablier tint l'épisode
On le retourne à la vieillesse

Alors la vie reprend joyeuse
Ni plus ni moins que de laideur
Et ni plus ni moins ennuyeuse
Rome en gagne des airs frondeurs

Départ départs retourne-t-en
Jours sans pluie plein de soleil
Le train part portes sans battants
Jours sans pluie plein de merveilles

(Crédits photos : Henri Cartier-Bresson, Agence Magnum Photos, 1959)

dimanche 9 mars 2014

Rhume

Le printemps renâclait à montrer ses naseaux
L'hiver comme une grippe agrippait mon museau
Et s'il ne pleut plus là mon nez reste en gouttière
Ca s'écoule ainsi qu'aux vieux châteaux monte un lierre

Le printemps lui s'enfuit même avant de venir
Qui sait ce qui paraît même avant d'advenir
Verrons-nous en Ombrie s'égrainer les moissons
Ou bien en andalou rirons-nous des moussons

Je ris à étriller les bulletins du temps
La semaine future aurons-nous un instant
Les câlins de la pluie ou bien ceux du soleil
Ou le gris vagabond ou le rosé vermeil

vendredi 7 mars 2014

La Terrasse heureuse

Et le soleil se craint de nous râper le derme
Le vent lui ne se gêne à éructer tranquille
Il toussote en mistral et nous émeut les cils
Sur la terrasse nous avions l'amour en germe

Couvée d’opisthographe éconduit à plus tard
- Nous vivions l'âme en fleur au beau fixe nos cœurs
Hélios seul témoin Zéphyr seule liqueur
Les pages détournées les klaxons seuls pétards -

La table recueillait et nos voix et nos pages
Et nous mangions heureux douze gâteaux d'amande
Lançant là nos regards aux varappes romandes

Assoupis de soleil nous étions trois rois mages
Contemplant dans le jour chaque constellation
Rêveurs nous voguions parmi les foliations

Ah !

Tu penchais ton sourire aux vœux de madrigal
Et tu laissais ton rire ici comme un régal
Un vrai festin antique était offert aux hommes
Par ton zygomatique ô Babylone et Rome
Contre tes biguines tu nous veux ébaubis
Et moi je devine que masquent tes habits
J'en avais relevé un petit coin de soie
Ton heur là énervé cachait ce qui déçoit
Sous ta poitrine nue femme je découvrais
Qu'au lieu d'un cœur des nues me laissant m'effondrer
Voilà pourquoi perfide éprouves-tu qui souffre
Tu n'avais plus qu'un vide ainsi qu'un vaste gouffre

mercredi 5 mars 2014

Pas plus qu'un jardin de roses


"Une ville ne vaut pas plus qu'un jardin de roses."
José Santos Chocano, La Ville de fer

Assez de ce pas lourd âme cahin-cahan
Reprends la vie légère à être haute et lourde
Assez d'assourdissant âme à l'oreille sourde
Reprends l'hymne dansé du pas des grands ahans

L'orée a son mystère et la ville en a trop
De cacher sa misère et d'en faire marché
D'avoir au même lieu la traînée et l'archer
La voiture au galop et les rêves au trot

Dans les rues serpentes les toits hallebardiers
On voit mouvante et nue l'âme de cette ville
Entonnant en vers libre une chanson servile

Vierge innocente autant qu'épouse répudiée
Me consoleras-tu d'avoir si peu compris
De ce que d'âme et corps tour à tour je m'épris

mardi 4 mars 2014

Rixe



Parmi les rigodons les âmes fantastiques
J’ai vu dans ces ombres la rage malhabile
Pour la bière tombée il en chauffait sa bile
Il avait les coups secs et la colère antique

Dans toute l’ivresse des attaques en pluie
Il valsait agité avec l’air dans ses bras
Mettant nu le torse de l’ivre scélérat
La foule s’écarta se cercla sans un bruit

Et puis la rumeur les cris encouragés
Poussaient ces deux Bacchus aux pires coups de poings
L’homme est fils de l’orgueil un Narcisse enragé

L’un coucha l’autre au sol plutôt qu’en quelque foin
Qui est sorti vainqueur de cette échauffourée
Ni l’autre ni l’un mais la bêtise amarrée

(crédits photos: David Seymour, Rome, 1951, Agence Magnum Photos)

Blandine



Mais je n’ai rien de plus qu’un maigre fond de bière
Que l’on boira santé ! pour apaiser d’houblon
Les veines agitées dans le petit salon
Alors on dansera comme l’on chantait fiers

Dans les rêves conscrits à ces moissons d’été
Couchés dans la prudence aux ombres rassurantes
Débiteurs satisfaits des amours finissantes
Nous aurions pleuré les départs tous hébétés

Je ne me doutais pas dans ce soir endormi
De trouver sûrement tant de joie au tamis
Quand je cherchais la larme à verser aux départs

Et pour tout achever de tragique en mes jours
Je te vis rieuse Geneviève aux remparts
Je me dis quelle joie que Blandine en séjour